"L'excellence au féminin" la suite ! Le Guide de la Vue vous propose ce nouveau volet de la mise en lumière de chercheuses d'excellence à l'Institut de la Vision. Après le portrait du Dr Deniz Dalkara, spécialiste en thérapie génique, voici le portrait du Dr Valentina Emiliani, directrice de recherche CNRS, physicienne, directrice d’équipe à l’Institut de la Vision et responsable de département, elle est experte en modulation du front d’onde et en manipulation optogénétique des circuits neuronaux du cerveau.
Avec ses recherches révolutionnaires à l’interface de l’optique et des neurosciences, la Dr Valentina Emiliani a propulsé l'optogénétique dans une nouvelle dimension et ouvert l'ère de la manipulation optique des circuits neuronaux dans le cerveau. Avec plus de 70 publications à son actif, l’excellence de ses travaux lui a valu ces dernières années de nombreuses distinctions: le prix Coups d'élan pour la recherche française de la Fondation Bettencourt Shueller, le European Young Investigator Award, la Chaire Axa, l'European Research Council Advanced Grant en 2020, la médaille d’argent du CNRS en 2021, et cette année, le prix Maxime Dahan pour l’Instrumentalisation et les Méthodes Innovantes à l’Interface Physique-Biologie-Médecine et le Michael S. Feld Biophotonics Award. « Après une thèse sur l’effet tunnel en physique quantique et plusieurs années de recherche sur les propriétés optiques des structures à effet quantique, j’ai décidé de reconvertir mes connaissances en physique vers la biologie. J’ai ainsi réorienté mes recherches vers l’interface entre l’optique et la biologie, plus précisément entre la microscopie et les neurosciences. Avec mon équipe, nous avons été parmi les premiers à utiliser la technologie de front d’onde pour les neurosciences », relate la chercheuse.
Dr Valentina Emiliani : sculpter la lumière pour agir sur les neurones
Département :
Photonique de l'Institut de la Vision
Equipe :
Microscopie à modulation du front d'onde
En photo : Dr Valentina Emiliani,
© Institut de la Vision – SU_LArdhuin
En 2018, elle intègre l’Institut de la Vision, dont elle est responsable du département de photonique et de l’équipe « Microscopie à modulation du front d’onde ». Avec son pôle de physiciens, biologistes et ingénieurs, la Dr Valentina Emiliani travaille au développement de méthodes innovantes de microscopie pour l’imagerie et la manipulation optogénétique. Dans cette nouvelle discipline, les chercheurs se sont d’abord concentrés à utiliser des modes d’illumination qui permettent d’éclaircir et donc d’activer en même temps de grandes régions du cerveau, afin de pouvoir corréler les effets observés avec un type cellulaire précise. « Cependant, dans des conditions physiologiques, l’activité neuronale est rarement synchrone. Un neurone ou un groupe de neurones vont s’activer les uns après les autres. Le défi était donc de réussir, avec la lumière, à reproduire ce schéma d’activation en ciblant une cellule, puis une autre et une autre, dans une certaine séquence spatio-temporelle. C’est là qu’avec notre équipe, nous sommes entrés dans le jeu de l’optogénétique », explique la Dr Valentina Emiliani. Un challenge qui comportait de nombreux défis. Le premier : focaliser la lumière en profondeur. « Pour cela, nous avons utilisé la lumière infrarouge qui pénètre mieux les tissus, poursuit la chercheuse. Pour activer une cellule de façon isolée, nous avons eu recours à l’excitation biphotonique, consistant à utiliser des lasers pulsés très puissants pour obtenir l’absorption quasi simultanée de deux photons au plan focal et donc éliminer l’excitation hors plan focale. Dernier défi : trouver une manière de redistribuer la lumière en 3D dans le cerveau, pour pouvoir manipuler différents neurones d'un circuit neuronal donné, souvent organisé selon une structure 3D. Défi relevé grâce à la technique de l’holographie. »
" Nous avons développé des technologies de pointe de sculpture de la lumière, ce qui permet
un contrôle optique précis de l’activité neuronale d’une ou plusieurs cellules "
En combinant des méthodes purement physiques telles que l'holographie, le contraste de phase généralisé et la focalisation temporelle, à l’optogénétique, la Dr Valentina Emiliani et son équipe ont ainsi développé des technologies de pointe de « sculpture » de la lumière, ce qui permet un contrôle optique précis de l’activité neuronale d’une ou plusieurs cellules. Grâce à cette approche qu’ils ont nommée « circuit optogenetics », il est aujourd’hui possible de mimer avec la lumière des modèles d'activités cérébrales spécifiques et de les relier au comportement des animaux. Ces nouvelles méthodes ont tout d’abord été validées in vitro et in vivo dans plusieurs modèles biologiques, puis appliquées à des projets en collaboration avec plusieurs groupes de neurobiologistes. Elles permettent de faire avancer la recherche fondamentale sur le cerveau et les mécanismes de fonctionnement des circuits visuels bien sûr, mais également de la mémoire, des émotions, etc. Elles ouvrent enfin la voie à la manipulation optique des circuits neuronaux dans le cerveau pour restaurer des fonctions sensorielles perdues comme la vue ou l’audition.
Photo en vignette : Dr Valentina Emiliani en interview à l'Institut de la Vision. © Institut de la Vision – SU_LArdhuin
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